Frais d'expertise du CHSCT à la charge de l'employeur : le conseil constitutionnel invalide les dispositions du code du travail (Décision du CC n°2015-500 QPC du 27 novembre 2015)
Aux termes de sa décision n° 2015-500 QPC du 27 novembre 2015, le Conseil constitutionnel vient de déclarer non conforme à la Constitution, l'obligation faite à l'employeur par la jurisprudence en application de l'article L. 4614-13 du code du travail, de payer les frais d'expertise lorsque la délibération du CHSCT est annulée par le juge.
I / Position du Conseil constitutionnel
La société requérante invoquait au soutien de sa demande, que l'article L. 4614-13 du Code du travail conduit à une méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif de l'employeur ainsi qu'à une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre de l'employeur.
Le Conseil constitutionnel a fait droit à ces arguments, en jugeant que l'absence d'effet suspensif du recours de l'employeur cumulé à un défaut de délai imposant à la juridiction saisi de statuer dans des délais brefs, a pour conséquence de priver l'employeur de toute protection de son droit de propriété en dépit de l'exercice d'une voie de recours, alors que les frais expertises dépassent facilement 30.000€ par intervention.
Le Conseil constitutionnel en conclut que la procédure applicable méconnaît les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 et prive de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété.
Il déclare en conséquence contraires à la Constitution le premier alinéa et la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 4614-13 du code du travail, en différant sa date d'application au 1er janvier 2017.
II / Conséquences pratiques : Abrogation des dispositions litigieuses en 2017
La conséquence directe de la non-conformité de la loi sera l'abrogation dans le Code du travail de l'obligation pour l'employeur de prendre en charge les frais d'expertise du CHSCT.
En d'autres termes, l'obligation pour l'employeur de régler les frais d'expertise du CHSCT disparaîtra de l'ordre juridique français.
Face à la paralysie prévisible du recours par le CHSCT aux expertises, le Conseil constitutionnel décide toutefois de reporter la date d'abrogation au 1er janvier 2017, « afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ».
En pratique, cela signifie que les règles relatives à la prise en charge du coût des expertises resteront inchangées jusqu'au 31 décembre 2016.
Le législateur devra de son côté légiférer sur un nouveau dispositif de prise en charge de expertises à compter du 1er janvier 2017.
Il est peu probable dans les faits que les nouvelles dispositions interdisent à l'expert de travailler pour le CHSCT au motif que l'employeur contesterait l'expertise, ce qui dans de nombreux cas priverait l'expertise d'intérêt.
Plusieurs pistes seront probablement explorées :
- Imposer au juge de rendre sa décision dans des délais brefs ;
- Obliger le CHSCT à payer en cas d'annulation de l'expertise, ce qui supposerait soit de le doter d'un budget propre –ce qui n'est pas le cas à ce jour-, soit de lui attribuer une part de celui du Comité d'entreprise -ce qui serait nettement plus économique pour l'entreprise-.